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mardi 14 août 2012

Sagesses et malices de la Perse


Sagesses et malices de la Perse, Lila Ibrahim-Ouali, Bahman Namvar-Motlag, Marjane Satrapi, Albin Michel

Voici un petit recueil d'histoires absolument savoureuses tirées du célèbre Mathnawi du grand poète et mystique persan Rûmî. Les auteurs ont restitué les contes dans un style simple et clair, accessible dès le plus jeune âge même si la morale sous-jacente à certains d'entre eux nécessitera les explications d'un adulte. C'est un livre idéal pour les parents à offrir à leurs enfants. Il leur permettra d'établir un dialogue avec eux sur les questions éternelles de la vie. Le recueil est agrémenté de dessins de Marjane Satrapi qui avec une économie de moyens remarquables, en utilisant uniquement le noir et le jaune, parvient à évoquer le caractère cocasse des contes et des personnages.
Sagesses et malices de la Perse plaira aux petits comme aux grands tant les paraboles de Rûmî ont des significations profondes et abordent des sujets aussi divers que l'âme, la vie avec ses joies et ses peines, les faiblesses humaines mais toujours en posant un regard bienveillant sur le monde et sans se départir d'un ton humoristique, léger et malicieux. Ecoutons ces quelques contes qui comme nous l'avertit Rûmî en personne sont le récit même de notre état :


LE GRAMMAIRIEN ET LE CAPITAINE

Un capitaine transportait les gens d’une ville côtière à une autre sur son bateau. Il connaissait bien son métier et sa réputation s’était rapidement établie dans la population : on l’appréciait pour son expérience et son courage.
Un jour, un grammairien monta à bord de son bateau. Ce savant était plein d’orgueil et de prétention. Sans arrêt, il reprenait méchamment les gens qui s’exprimaient mal : il se moquait de leur accent, de leurs phrases bancales… Si bien qu’autour de lui, on préférait souvent se taire ! Pourtant, ce jour-là, sur le bateau, on se souciait peu de lui : les passagers écoutaient avec beaucoup de plaisir les histoires de marin que le capitaine leur racontait. L’estime dans laquelle ils tenaient ce personnage des mers augmenta la jalousie du grammairien. Pour rabaisser le capitaine, il l’interrogea devant son public :
- As-tu lu la grammaire ? Connais-tu la syntaxe ? La phonétique ? L’étymologie ?…
- Non, répondit le capitaine étonné. J’ai appris un peu de grammaire à l’école mais je ne connais pas les sciences dont tu me parles.
Triomphalement, le grammairien conclut :
- Tu as perdu la moitié de ta vie.
Sagement, le capitaine garda le silence.
Quant au grammairien, redevenu l’homme le plus important, il se lança dans un long monologue dans lequel il était question des ouvrages qu’il avait écrits, des conversations qu’il avait eues avec de célèbres écrivains...
Quelques heures plus tard, le ciel se remplit de grands nuages noirs, les vents se transformèrent en tempête. Le bateau tanguait dangereusement, fragile comme une paille sur la mer devenue houleuse. Sans perdre ses esprits, le capitaine s’occupa de sauver ses passagers et d’abord les enfants. Soudain, il tomba sur le grammairien recroquevillé sur lui-même dans un coin de la cabine. Il lui demanda :
- Sais-tu nager ?
Le grammairien, effrayé, répondit d’une petite voix :
- Non, je n’ai jamais appris.
Le capitaine dit :
- Toute ta vie va être perdue !


LE ROI ET SES DEUX SERVITEURS

Un roi venait d’engager deux nouveaux serviteurs. Comme il était intelligent et prudent, il entreprit de mettre à l’épreuve leur caractère et leur fidélité. Il les fit venir dans ses appartements et conversa avec les deux hommes afin de mieux les connaître. Puis il envoya l’un d’eux au hammam.
En l’absence de celui-ci, le roi se mit à questionner le deuxième serviteur sur des choses et d’autres. Et habillement, il emmena la discussion sur le serviteur absent.
- Ton ami me semble très envieux, dit le roi. Je crois aussi qu’il est menteur et perfide.
Le serviteur répondit :
- Pourtant je ne le connais que sincère, fidèle et honnête.
Le roi poursuivit :
- Il n’est pas aussi bienveillant à ton égard. Sache qu’il prétend que tu as mauvais caractère.
- Je ne lui en ferais pas reproche. Tout le monde a des défauts, et qui mieux qu’un ami peut les voir ?
Le premier serviteur revint du hammam ; le roi l’invita à s’asseoir à côté de son trône. Aussitôt, il affirma à ce serviteur qu’il avait été l’objet des critiques de son camarade.
- Il prétend, expliqua le roi, que tu es hypocrite et malhonnête.
Le serviteur, rouge de colère, s’écria :
- Il vous a trompé, mon roi ! C’est lui l’hypocrite ! Depuis le premier jour, j’ai douté de sa sincérité ! Sous son apparente gentillesse, il possède le caractère le plus fourbe qui…
- Cela suffit ! l’interrompit le roi. Je sais bien maintenant qui de vous deux sera le plus fidèle serviteur.


LE CHEMIN DU BIEN

Un jour, un sultan se rendit à la mosquée. Pour y arriver, il lui fallait traverser un bazar qui grouillait de monde. Aussi ses gardes lui ouvraient-ils le chemin en frappant la foule à coups de bâton. Ils les tapaient sur la tête, les bousculaient, les jetaient volontairement à terre. Un vieillard ne put s’écarter à temps au passage de la garde et il reçut sur-le-champ une dizaine de coups. Il s’adressa alors au sultan :
"Vois ce que tu fais pour aller prier à la mosquée. Ta bonne action n’en a que l’apparence. Et de quoi seras-tu capable le jour où tu décideras de commettre une mauvaise action ?"


L’HOMME ET SON CHIEN

Sur le bord d’une route, un homme se lamentait : devant lui son chien agonisait. Un mendiant qui passait par là l’interrogea :
- Quel est ton malheur, brave homme ?
- Ne vois-tu pas que mon chien est en train de mourir ? C’est le meilleur des chiens, fidèle et discipliné. Il me protégeait des voleurs, il chassait pour moi. Mon bon chien !
- De quoi souffre t-il ?
- Il meurt de faim !
- Et pourquoi ne lui donnes-tu pas de ce pain que je vois dépasser de ton sac ?
- C’est ma nourriture ! Ma pitié a tout de même des limites. Je veux bien pleurer mon chien, les larmes ne coûtent rien. Mais ce pain, je l’ai acheté, il est pour moi !


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